Le draule et la draulesse
I
C’est l’histoire d’un draule qui était d’Brizambourg
O l’était pas mauvais le draule, toute la semaine il travaillait
Ses amis ? Tous sont partis du bourg
Lui, il est resté avec ses parents qu’il ne voulait laisser
Il travaille et pourtant c’est à faire
Il est ponctuel et fait ce qu’on lui aurait demandé
Il n’a d’ambition que de vouloir être heureux sur ces terres
Le draule, chaque matin se lève et chaque soir il revient pour diner
Quand il débauche, il se renferme car nulle part il ne veut aller
Ne parlant pas beaucoup, il fait selon sa tête et son corps
Ses amis ? Il les voit quelquefois mais c’est pour mieux repartir après
Le draule, triste il reprend sa vie d’alors
Le draule accompagne ses pauvres parents
Il ne veut être un fardeau, il ne veut être seul
Partout, on les voit ensemble, lui toujours derrière avec ses sentiments
Il est pas mauvais l’draule, il n’a pas une sale gueule
L’histoire de sa vie s’écrit peu à peu
Le draule la voit défiler dans le bourg qu’est le sien
Seul il est et à ses choix il songe ce qu’il devient pour si peu
Il travaille, il vit, il était attrapé et approuve ce bien
Un dimanche, s’annonce un loto un peu plus loin
Il se dit que peut-être il veut voir ce qui se passe là-bas
Du côté de Matha, le draule se dit que ça peut l’occuper au moins
Le jour se fait et il se prépare
Le draule veut voir et se fait beau
Les parents se disent que le draule n’est pas mauvais
Des draulesses y en aurait à Matha pour le loto
Il parlerait le draule et des draulesses il verrait et connaitrait
II
C’est l’histoire d’une draulesse qu’était d’Macqueville
Elle était pas mauvaise la draulesse, elle ne pouvait travailler
Ses amis ? Elle n’en a pas beaucoup. Avec tout le monde, elle est gentille
Elle n’a plus ses parents, elles les aimait
Elle n’a autre chose qu’à faire
Que de s’occuper toute la journée
Elle n’a d’ambition que de vouloir vivre sur ces terres
La draulesse, chaque matin se lève et chaque soir elle regarde la télé
Quand elle pense toute la sainte journée, elle fait rien, elle veut travailler
Elle reste chez elle, elle n’aime pas trop aller dehors
Ses amis, elle les voit plus car ils ont une vie pas tout près
La draulesse, elle n’en veut à personne. Elle est comme ça dans son corps
La draulesse n’a plus ses pauvres parents
Elle a bon cœur, elle veut plus être seule
Elle se trouve pas belle, elle est avec ses sentiments
Elle n’est pas mauvaise la draulesse, elle a pas une sale gueule
L’histoire de sa routine s’installe peu à peu
La draulesse la voit défiler dans le bourg qu’est le sien
Seule elle est et à ses choix elle songe ce qu’elle est pour si peu
Elle fait rien, elle cherche, elle est attrapée et approuve ce bien
Un dimanche, s’annonce un loto un peu plus loin
Elle se dit que peut-être elle veut voir ce qui se passe là-bas
Du côté de Matha, la draulesse se dit que ça peut l’occuper au moins
Le jour vient et elle se prépare pour aller à Matha
La draulesse se fait belle pour connaître des draules
Elle pense connaître un draule qui serait pas mauvais
Des draules, y en aurait à Matha pour le loto
Elle parlerait la draulesse et des draules elle verrait et connaitrait
III
Ya pourtant bien des gens qui sont allés à Matha
Des environs presque tous sont allés au loto
De Saint-Jean et de Néré, Haimps et certains de Cougna
Les gens ont passé l’après-midi, certains ont gagné des lots
Les gens ont vu des amis, la famille, presque tous étaient là
Ils se sont assis ensemble, de tout et de rien ils ont parlé
Ils passeront un bon moment, ils oublieront pas
Ils voient les bourriches et les lots, des cartons ils ont acheté
Les numéros sont tirés et le silence se fait
Certains n’ont pas de chance mais ils veulent gagner
Une ligne, deux lignes, un carton et on lève la main, ils ont gagné
Ça chuchote et ça regarde, ça rigole, on s’demande si certains ont triché
Comme ça toute l’après-midi, quelqu’un que l’on reconnait
On salue, on va voir les autres tables
Ça repart, d’autres numéros sont tirés
Le gros lot se fait en dernier, c’est recommandable
Une pause se fait, certains partent fumer, d’autres boivent un verre
Ça discute, le brouhaha se fait
Une part de tarte qu’ils vendent pour l’amicale qui ne date pas d’hier
Dans cette ambiance de campagne, on se plaît
Les draules, ils jouent avec d’autres sans se soucier
Ça chahute, certains les foudroient du regard, dehors, dedans
Y a des réprimandes, on les fait taire, le silence doit se faire et se fait
La salle des fêtes est un lieu de jeu, de découvertes pour mille ans
Le gros lot arrive, un voyage, un scooter ou une télé
Tous retiennent leur souffle, certains ont plusieurs lots mis de côté
Vingt numéros, il y en manque trois ou quatre, le numéro n’est pas tiré
Enfin un cri ! Des oh et des ah se font entendre dans la foule acclamée
Durant des heures jusqu’à tard le soir
Du côté de Matha les gens sont venus
Y avait le loto, les uns et les autres se disent au revoir
On se reverra, on prendra l’apéro, un coup de pineau sera descendu
IV
Le draule et la draulesse n’y sont pas allés
Les deux sont restés chacun de leur côté
Brizambourg,
Lui dans le bourg
Macqueville,
Dans la maison de ses parents, elle a pas voulu aller en ville
Lundi, lui travaillera dans les vignes, il fera pas beau temps
Mardi, elle regardera la télé car y a pas d’emploi pour elle
Mercredi, le draule se renfermera chez lui et ses vieux parents
Jeudi, la draulesse ne s’occupera pas d’elle
Vendredi, il s’assoira devant la maison
Et elle regardera la télé le soir et pensera qu’elle est con
Samedi, il accompagnera encore ses parents à Saintes ou à Cougna
Elle pensera qu’elle est pas faite pour ce monde et pleurera
Dimanche, il a pris un fusil et le draule s’est fait un trou
Portes et volets fermés, d’un coup de javel la draulesse elle aussi a un trou
C’est l’histoire de deux draules vivant dans nos campagnes
Les deux ont été oubliés par la société
On ne parle pas de ce mal de la campagne
Seuls, ils étaient dans leur corps et âmes oubliés
C’est la vie de deux draules qui ne sont pas connus
Ils auraient eu une vie tous les deux
Le draule, timide et avenant, il l’aurait pas fait cocu
La draulesse, gentille et intelligente, ils se seraient plu les deux
La solitude est une bien triste tare
Personne à qui se confier peut en amener un sous terre
Des monstres, il y en a toujours eu, pas ceux qui en ont marre
Des regards, des paroles, des gestes mais ils peuvent se taire
Le draule et la draulesse maintenant se connaissent
Ils n’ont pas mis longtemps pour se parler
Depuis longtemps, maintenant ils se connaissent
Une fleur sur leurs noms je mets pour ne pas les oublier
FIN
Chronique : Ciril le courlitous !